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Musée gaumais

Les 4 saisons de Frère Abraham

Jean-Louis GILSON (Habay-la-Vieille, 1741 – Florenville 1809) est le seul peintre connu dans nos régions avant la Révolution française. Ce caractère exceptionnel précède le riche mouvement pictural qui naîtra en Gaume dans la seconde moitié du XIXe siècle et s’épanouira jusqu’aujourd’hui.

Il vécut ermite aux « Bizeux », sur le ban de Mellier (aujourd’hui sur Marbehan commune de Habay), en compagnie de son jeune frère Jean-Henri, puis de leur père malade. Sans doute dès 1771, il rejoint Orval, où il sera moine convers sous le nom de Frère Abraham. Aidé de Jean-Henri, alias Frère Jérôme, également moine, il y consacre son existence entière à la peinture.

En cette fin du 18ème siècle, l’abbaye est en pleine effervescence. Un immense et riche chantier s’y poursuit: la construction d’une nouvelle abbaye baroque, sous la direction de l’architecte L.-B. DEWEZ. Avant de se consacrer à la décoration des salles conventuelles et de l’église abbatiale, Frère Abraham suivra un parcours à l’étranger (Trèves, Anvers, Mannheim, Düsseldorf) afin de se perfectionner en peinture, et exécutera des commandes pour des églises du Luxembourg. Mais entre 1780 et 1793, avec ses élèves et apprentis, c’est à Orval qu’il travaillera presque exclusivement à l’accomplissement d’une œuvre aussi prestigieuse qu’éphémère, détruite par la Révolution française.

A la fuite de la communauté entre 1793 et 1795, Frère Abraham y poursuivra ses activités dans le refuge des moines à Luxembourg et des maisons privées. Après la dissolution de la communauté à Conques en 1796, il se retire à Villers-devant-Orval puis à Florenville où il formera encore des élèves dont Ignace MILLIM ou Jean-Antoine RAMBOUX, futur conservateur du Musée Wallraf-Richartz de Cologne. C’est là qu’il décède en 1809.

Style et faiblesses de l’artiste

L’approche picturale de Frère Abraham s’inspire, pour une bonne part, des productions et d’estampes, e. a. italiennes et françaises, des XVIe, XVIIe et du début du XVIIIe. Ses compositions, selon qu’elles soient profanes ou religieuses, veulent transmettre au spectateur un enseignement ou le message des Écritures qui se traduit, dans ce cas, par une recherche constante du pathos. Ce trait majeur doit être rapproché du souci didactique de l’artiste, conteur et enseignant confirmé.

Frère Abraham joue avec la lumière mais accorde peu d’attention au paysage, à l’architecture et aux arrière-plans. Ceux-ci ne semblent pas liés, mais l’avant-plan leur semble seulement superposé pour focaliser l’attention sur l’essentiel du sujet. De même, les corps sont massifs et couverts de drapés qui en dissimulent les formes ; les visages sont peu détaillés, alors que les mains s’avèrent de réelles actrices de la scène. On observera des maladresses de proportions entre les différents membres (mains et pieds), transition inadéquate tête-cou-buste…. Par ailleurs, par souci d’expressivité, frère Abraham fait adopter des poses acrobatiques et peu naturelles à certains sujets, ce qui le mène aussi à l’erreur.

En matière de gamme chromatique, les œuvres accusent une grande constance : tons vifs de rouge, de rose et de bleu, coloris pastel, propres au goût du temps.


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